Bashkirtseff

Lundi, 3 août 1874

Orig

# Lundi, 3 août 1874

La journée est froide et grise, il pleut au commencement. J'ai déjeuné avec Paul chez Baas, à côté des Foligno.

(Robe grise, mal) nous partons, et nous nous plaçons au premier rang, vis-à-vis le pavillon de Marguerite. Il y a foule. Les Macainne, les Espagnoles avec Rodionoff, les Leeses, le monsieur auquel le gris va mal, del Puente, Jurybareen, tous ceux de la société particulière, les Haristoff, M. et Mme de La Roussellière, des Brésiliens et des Brésiliennes, des arrivés de Bruxelles et des villes voisines, de Neufarge, Kean, nos Américains, pas d'Américaines et tous ceux que nous connaissons, que nous ne connaissons pas et grande quantité de ceux que nous n'avons jamais vu.

Je ne dois pas oublier de dire que le monsieur n'est pas de La Roussellière, c'est le vicomte Desmanet de Biesme, il a fait courir un cheval, Ardente, il fait la cour à Mme de La Roussellière.

Les courses sont intéressantes, surtout les gentlemen riders, Wheelwright montait un ravissant cheval noir, âgé de trois ans, et il était le mieux habillé.

On craignait la pluie mais il n'y en eu point, il faisait gris, foggy, froid, mais pas de pluie.

Je suis allée dans les tribunes avec Paul pendant un intervalle, j'ai parlé avec Gambart etc.

Wheelwright a gagné au contentement de tous et fut amené dans le pesage devant les tribunes couvert de bravos et de cris — Wheelwright.

Mais le baron de Jenesais pas quoi a protesté, disant qu'il a coupé, ce fut un tumulte considérable, on alla sur l'endroit pour examiner les pas, mais comme il y avait plusieurs faux départs, on ne put rien prouver et on donna le prix à Wheelwright.

À la fin eut lieu la course des bidets de Spa, c'est la Cantinière qui a gagné, je la monterai.

Le départ s'effectue assez tranquillement. Je me suis ennuyée comme toujours aux courses, je n'avais que les moments où couraient les chevaux. Nous sommes de nouveau seules !

C'est Gericke qui dans sa méchanceté est cause de cela. Je voudrais savoir ce qu'on lui a fait pour qu'il devienne un ennemi.

Il défend au Grec d'être avec nous !

Maman a essayé d'empoisonner les courses mais je fis semblant de ne rien entendre. Elle tâche toujours d'effacer le plaisir qu'elle me fait par des tiraillements habituels.

Je veux dîner chez Baas, elle veut à Flandre, nous allons à Flandre, puis chez Baas, puis encore à Flandre et enfin chez Baas, où on mange le mieux à Spa. J'aime Baas comme London House.

Le soir il y a grand bal, la salle du théâtre sera arrangée en serre et communiquera avec la salle des danses.

Je savais que nous n'aurions pas de cavaliers et me mis en blanc et argent, [Rayé : simples] bottines noires fermées, gants écrus. Ma coiffure.

[Dans la marge : Wittgenstein 11 10 98765432 1]

Ce que je pensais arriva, il y avait bien Jahal mais qu'est-ce que c'est ! Il y avait encore un monsieur luxembourgeois, Wallenstein, puis Kirsh et l'Arabe, mais c'est de la misère. Nous partons à onze heures je suis chagrinée et prête à pleurer.

Marguerite, adorable en rose, a assisté au bal qui était très animé mais pas parfaitement élégant.

Tant je suis fâchée que je me mets derrière le lit de maman et reste là les yeux fermés jusqu'à ce qu'on me renvoie, puis de dépit je prends trois tasses de thé et me couche toute malheureuse. Je ne vivrai donc jamais comme j'aime !

Mon Dieu !