Bashkirtseff

Dimanche, 2 août 1874

Orig

# Dimanche, 2 août 1874

Nous allons voir les bonnes gens sortir de l'église. Gericke s'arrête non loin de nous et regarde comme nous, il est misérable, de près il gagne beaucoup, de loin il n'est pas posé, il n'est pas sûr de lui. Je ne le regarde jamais, pas même quand il salue, à vrai dire il m'intéresse médiocrement. Je suis en blanc, je suis un tout petit peu mieux qu'hier, pour un instant seulement. Maman veut faire une visite à la comtesse Merjeewsky, nous traversons pour cela l'allée des Sept heures, nous ne restons pas longtemps.

À la musique, Wheelwright avec son magnifique lévrier vient nous parler, il court demain.

Je voudrais beaucoup aller à cheval aux courses mais je n'ai avec qui, le cœur a dit au jeune homme de partir, il a une face de pendu aujourd'hui. Nous entrons à Orange lorsque le comte dit :

— Eh bien Mademoiselle, est-ce que je pars aujourd'hui comme je partais pour Bruxelles ?

— Comment partiez-vous à Bruxelles, je ne m'en souviens pas.

— Ah vous ne vous souvenez pas ?

— Non, vraiment ; j'ai la mémoire tellement... vous savez.

Il répétait les paroles après moi. Le dîner était mauvais. Je passe le soir chez moi, et me couche à onze heures, c'est beaucoup mieux.

Je veux m'arranger, je suis si laide.