Samedi, 13 juin 1874
# Samedi, 13 juin 1874
Tout le monde était sorti, excepté moi et Paul, maman avait dit qu'elle irait avec Walitsky entendre encore une fois la messe, j'ai travaillé une heure mon piano puis je pensais que ce sera fort triste de rester à la maison jusqu'à cinq heures, je m'habillai (robe grise, car il fait froid) et je m'en allai avec Paul à l'Opéra comique pensant y trouver les autres. C'est pour ainsi dire la première fois que je marche, avec maman on va si lentement.
A l'entrée, on m'a dit que maman était là, aux fauteuils, je demande une place à côté; point. On nous fait monter dans une loge au deuxième où il y avait déjà du monde. Je cherchais toujours maman mais rien. Dans l'entracte je la vois monter, elle n'était pas au théâtre mais vient d'arriver. Il y avait un commencement d'orage mais le requiem est trop beau pour qu'on ne l'écoute pas.
Cette fois je l'ai trouvé magnifique, sans oublier cependant qu'il n'est pas parfait.
Nous allons au Bois, il y avait peu; mais le retour a été très animé. Je crois que les courses étaient très belles aujourd'hui. On ne voyait que des hommes et beaucoup, très bien. J'ai encore vu le dos de Wittgenstein c'est drôle. Il fait froid.
J'ai refusé d'aller au théâtre ce soir, je serais trop fatiguée demain. Car me voilà à la veille du Grand Prix.
Berthe n'est pas venue chez moi, c'est peut-être parce que nous n'avons plus le Jockey-club à côté. Elle a raison, cette fille, mais je vaux mieux qu'elle. Je me suis abîmé le teint en veillant jusqu'à deux, trois heures du matin, depuis notre départ je mène cette belle existence; ce soir je vais au lit à onze heures.
Nous étions avec maman chez Alfred et maman lui raconte l'histoire de Dusautoy. Il va me faire une amazone. Il fait à la princesse Souvoroff qui est partie hier à cinq heures du matin, presque en cachette, on croît qu'elle a des dettes, elle les payera sans doute, mais pour le moment requiem æternam.
Il fait donc à la princesse et à sa fille, des costumes d'hommes, comme lord Falkner en portait à Bade. Je voudrais un pareil, mais où et comment le mettre ? Si j'étais Mme X ou Z... mais je ne suis que ce que je suis.
J'ai vu deux fois le gentil garçon qui me plaît tant, mais toujours dans le dos, c'est ridicule.
[En travers: Ce gentil garçon qui me plaît tant, c'est Girofla.]
J'ai défendu contre Walitsky ce petit, c'est-à-dire Audiffret, et beaucoup d'autres, puis une discussion sur la noblesse.