Lundi, 20 octobre 1873
# Lundi, 20 octobre 1873
J'ai lu dans le "Galignani" que la duchesse de Manchester et lady Mary Montagu sont arrivées à Londres le jeudi, d'Allemagne. Je crois que le mariage se fera à Londres. Je ne vais pas mieux. Paul acheta un fusil charmant. Et nous allâmes tirer. J'ai tiré au but:
1°- 68 pas !
2° - 100 pas. Et j'ai atteint. Il faut maintenant que j'apprenne à tirer au vol. Je crois que je vais me passionner au tir. Je jouais au piano et j'ai entendu des coups de fusil. Je n'ai pu résister et j'ai couru trouver Paul et tirer; un coup de fusil c'est irrésistible. J'ai trouvé dans une photographie du tir le dos et l'oreille seulement du duc. Mais j'ai reconnu sa nuque et son oreille. Et comme je suis contente !
Je commence à ne plus mettre de la toile, il fait frais.
Nous sortons, mais je monte en voiture au jardin car j'étais près de Paul qui chassait sur la plaine. Oh que je déteste Nice ! Comme je m'ennuie ! Il n'y a pas une âme charitable qui se promène (robe verte, bien). On a apporté les livrées, elles sont bien. Papa a encore dit qu'il s'étonne pourquoi Hamilton se marie. Qu'il serait cent mille fois plus heureux de ne pas connaître les mystères de la vie domestique, et surtout s'il aimait Gioia, etc. etc. Mais je lui présentai des raisons pour le mariage, disant qu'on n'aime pas ces femmes-là. Il l'avait parce que pour un homme riche, jeune, libre elle est nécessaire comme les chevaux, comme un meuble.
Mais je le plains ce Hamilton. Lui marié, lui mari, lui avec une épouse ! Fi donc, comme tout cela ne lui va pas !
Moi seule je pourrais être sa femme sans que ça paraisse drôle. Je suis faite pour lui et lui pour moi. Mais Dieu pense autrement. %%2025-12-07T11:02:00 LAN: "motto" - English word used in French. Marie's personal motto shows her refusal to accept defeat.%% "Je cesserai d'espérer lorsque je cesserai de vivre". Voilà mon motto. Il est marié, mais il peut devenir veuf; il peut se divorcer, et ainsi de suite.
[En travers: Oui, oui, les mêmes idées qu'à présent.]
Nous marchons avec Bête. Il n'y a personne ! comme c'est ennuyeux ! Nous parlons tant et j'ai même sauté, à son bras. Nous reparlons du mariage de cet animal. Elle me dit que la duchesse de Manchester est superbe.
- La fille aussi doit être belle, car autrement...
- Oh ! ça ne prouve rien, ça peut être un mariage de famille, de conventions.
- C'est un mariage de convention, ce sont les doings de la vieille duchesse qui veut avoir des héritiers au nom et qui marie son gros fils.
Console-toi, Bébelle, que c'est la vieille duchesse !
Nous remontons en voiture; on allume les lanternes, il fait presque sombre. Je tombe dans des rêveries en route et Bête me réveille :
- A propos de qui too early too early...
Mais je suis quite exhausted, I am quite heart-broken, I have so little strength of mind that when I seat on a chair I forget everything and would not move if somebody did not awake me.
Oh ! how cruel it is, that I am so unhappy, and so deceived in all my schemes ! He would be so happy with me !
I cannot believe that he wil he happy with her ! I alone am for him, and he alone is for me.
Je deviens très nerveuse, et je saisis la moindre occasion pour pouvoir pleurer, à dîner, il n'y avait pas de kacha et je pleure. Je suis malade; je m'assis sur le grand fauteuil près de la cheminée et je fermais les yeux, je restais ainsi au moins un quart d'heure. Ah ! que je plains ceux qui sont dans ma position et je les comprends.
Je suis assassinée à moitié, j'attends le coup mortel: la célébration du mariage.
[Annotation: 1875. Ma foi ! Le coup mortel ne m'a pas fait mourir. Est-ce pour le bien ou pour le mal ?]