Mardi 26 août 1873
Mardi 26 août 1873
Nous faisons nos paquets avec l'intention de partir à onze heures mais ni les chapeaux, ni la robe ne sont prêts. On reste jusqu'à sept heures du soir. Laferrière envoie ma robe, le corsage va encore plus mal, je la renvoie.
Nous sortons, chez Ferry ma tante achète des bottines, pour moi aussi, une paire à barrettes. %%2025-12-07T12:40:00 LAN: MARIE-QUIRK: Pride in small feet - 19th century beauty standard%% J'ai le plus petit pied du magasin. J'ai par dessus mille francs sans doute. Je passe encore devant Klein, je m'arrête pour regarder Gioia. Mais elle ne peut pas être si belle en réalité, je me souviens d'elle. Premièrement elle se farde beaucoup et puis elle n'est pas gracieuse, sa démarche est laide. Il est vrai que ça n'a rien à faire avec les traits et le buste. Je dis à Dina: comme elle est belle, mais le photographe l'embellit de beaucoup, je veux demander son adresse. J'entre sur cela, je demande. C'est un photographe excellent me dit-on. Walery, rue de Londres, 9.
Je veux à l'instant faire faire mon portrait. Je dis cela à tous.
Et je réussirai, je suis animée, j'ai les yeux ouverts et ça ne m'arrive pas tous les jours depuis un mois.
En passant la tante achète un vêtement. Nous prenons un fiacre et nous sommes chez Walery, photographe.
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Je monte au premier. Dans un petit salon à côté il y a Gioia dans différentes poses.
Je disparaissais à chaque minute pour la regarder, pendant que l'on me demandait quelle carte je veux. Sur une de ses photos, elle est très ouverte. Je me demande comment, étant le corsage tellement ouvert, on ne voit rien. Ça serait trop si à son âge, elle était faite comme moi. Cependant maman est plus âgée je crois et elle est encore comme à seize ans de poitrine. Gioia est mille fois mieux que moi. Mais dans dix ans elle sera vieille, dans dix ans je serai grande. Je serais belle si j'étais plus grande. Etant faite comme je suis faite et une grande taille avec cela serait superbe. La figure passe toujours, la mienne n'est pas laide. Je me coiffe bien et je monte. Il me donne des poses jolies, mais trop chiffonnées.
J'ai posé huit fois, trois fois une pose assez jolie qui ne pouvait réussir, le photographe y tient. J'ai posé pour la quatrième fois en me disant: Eh bien si cette fois cela réussit, il... je me comprends. Je sors sans avoir le résultat.
Voyons ce qu'on fera de moi. Paul qui pose après moi, me dit que ça va bien ! Je vais chez l'ennuyeuse Laferrière. J'essaye, elle arrange et je crois que cette fois tout ira bien. Elle a un genre qui me plaît. Chez Mantel, les chapeaux sont en mains.
Nous rentrons, les malles sont faites, la robe vient, elle est atroce, je ne sais pas quoi faire, je pleure, c'est toujours ainsi.
Enfin je la refuse, je n'ai qu'une robe, celle de Worth. Il m'en faut encore, quelle histoire II Les chapeaux viennent, ils sont charmants.
Nous partons demain à onze heures. On va dîner au restaurant russe. Je ne sais quelle robe j'aurai. Tant que je ne pouvais pas avoir la noire, je la voulais, et maintenant lorsque je puis, je ne sais pas.
Après dîner nous marchons sur les boulevards le soir, il y a des hommes, %%2025-12-07T12:41:00 LAN: EXPRESSION: "dernieres vilenies" = lowest sort of women - Marie's euphemism for prostitutes%% des dernières vilenies, et des étrangères. Pas une seule %%2025-12-07T12:42:00 LAN: PERIOD: "grande cocotte" = high-class courtesan - social category known to 14-year-old Marie%% grande cocotte.
J ai acheté des boucles d'oreilles et un médaillon (robe de voyage) un coquelicot, une marguerite, le médaillon est un seul coquelicot.