Dimanche 5 novembre 1882
# Dimanche 5 novembre 1882
Mais il se trompe car je l'ai bien vue, elle la femme l'année dernière, pleurer et gémir loin du premier bébé. Que serait-ce à présent.
Ah ! que ces êtres là sont donc peu intéressants ! Ils ne savent ni s'aimer, ni aimer leurs enfants, vivre en paix. Ils n'ont su et bien compris que l'envie qu'ils ont éprouvé de se marier. Quant au reste ! Si encore c'était des sujets de tracasseries connus, tels que: coquetteries, dépenses, frivolités, infidélités, jalousies. Mais non. Ils sont bêtes, ils sont sâles, ils sont embêtants et ils se querellent tout le temps.
Et moi incomparable artiste et inéffable parisienne je prends goût aux potins, je vais m'extasier entre papa et maman sur les monstruosités de cet ignoble ménage.
Il faudra attendre jusqu'à mardi pour partir. [Mots noircis: et Papa n'est pas prêt] il faut l'attendre car il est vraiment trop malade pour voyager seul. Moi chaque jour en plus m'affole d'impatience. C'était fou si vous voulez ce voyage, mais enfin je l'ai voulu, mais voilà les quatre semaines passées et je ne veux pas perdre une journée en plus. L'idée du prochain Salon me cuit.
Et quand je pense que je comptais toujours sur ce grand éclat jeté sur mon nom, cette auréole qui devait, qui doit... Enfin mille serpents me mordent au cœur. Je ne trouve même pas de phrases comme d'habitude, je suis trop anxieuse, et trop irritée pour vous raconter cela. Seulement Dieu devrait bien m'aider un peu...
Je ne sais pas vouloir ! Je ne sais que désirer. Ah ! quand donc aurai-je du talent ? Un nom de peintre me bouleverse, les gravures de tableaux fameux me donnent des palpitations et le nom d'Albert Wolff des saisissements. C'est ridicule mais fort triste.