Mercredi, 12 août 1874
# Mercredi, 12 août 1874
Maman est malade et moi, Dina et Walitsky nous allons voir la ville en voiture. J'aime beaucoup Bruxelles, mais c'est étrange on dirait Paris après la guerre, tout est en réparation ou en construction.
Je n'ai visité ni jardins zoologiques, ni museum, c'est trop bête. Je suis allée visiter : les écuries du Roi, mais je ne trouve que quinze chevaux, les autres cent cinq sont à Laeken avec le Roi.
Je me suis arrêtée devant un cheval et c'était justement le cheval de manœuvre du Roi.
J'aime Bruxelles parce qu'il y a un roi, une reine, des princes, parce que tout est en ordre, on respecte les titres etc.
Dans la galerie de la reine j'ai vu chez un cordonnier une paire de bottes jaunes pour homme, si immenses ! Avec des abat-jour pour les genoux. Ces bottes ressemblent tellement au duc de Hamilton qu'elles me font rêver à lui pendant deux jours.
Puis je me figure Blackprince avec ces bottes, il est de toute beauté botté. Comme l'habillement fait beaucoup, ensuite je me figure Hamilton ainsi botté et j'ai dit : L'un est un dieu, l'autre un homme, mais combien le dieu est un homme cher.
Je me le représente en l'air, sur une élévation depuis ces bottes. Je voudrais les acheter, elles me serviraient de portrait. Je viens à la maison et dis :
— Maman, quelles bottes, mais quelles bottes jaunes d'une taille extraordinaire.
— Comme celles de Hamilton ? demanda-t-elle en souriant. Je me lève et rougis.
Jamais depuis son mariage elle n'en a parlé, et chaque fois qu'on en parle devant elle, elle ne l'aime pas et change de conversation.
La soirée se passe en mangeant des fruits.