Lundi, 5 janvier 1874
# Lundi, 5 janvier 1874
Je me décide à ne pas aller à Monaco, ce n'est pas bien qu'on me voit toutes les fois à ce Tir.
Je prenais ma leçon d'anglais lorsque Walitsky passe sa tête à travers la porte: L'oncle Stiopa. Je saute et à la porte rencontre l'oncle Stiopa; après nous avoir embrassés nous allons chez maman où était déjà Machenka. On me trouve engraissée. Stiopa me trouve belle, car il m'aime.
Ils ont apporté toutes sortes de choses salées, russes, et des confitures. Ça va sans dire que je fiche mon anglais et Hitchcock avec.
Cependant à quatre heures je sors avec Bête que j'ai injustement nommée ainsi; mais Bête est plus court que princesse et je le préfère, (robe brune et chapeau bien). Il n'y a plus personne, il fait froid et bientôt sombre. Stiopa et Machenka logeront chez Walitsky. A dîner Stiopa disait que je devais absolument me marier avec un grand-duc.
Moi : C'est dommage que le prince de Monaco soit marié.
Stiopa: Et Hamilton s'est marié ?
- Qui ? Ah ! Hamilton ! Oui, il s'est marié.
Et j'ai rougi.
- Elle a rougi, vous voyez, j'ai deviné.
Ensuite on parla des Hamilton russes, comment leur glorieux nom est devenu Gamenton, puis Gamentoff, ensuite Khamoutoff. Papa raconta comme toujours l'histoire de cette lady Hamilton qui fut décapitée sous Pierre Ier. Je me suis empressée de raconter mes goûts; que je n'aime pas les Russes, que je resterai à l'étranger, les courses et tout ce que j'aime enfin. Stiopa sans doute, me persuadait que la Russie est mieux, que les traîneaux avec la troika etc. etc.
J'ai joué Le Ruisseau qu'on n'a pas compris. Enfin depuis leur arrivée je vais, je viens, je joue, je parle et je ne fais rien. Demain c'est notre Noël, on dit qu'il faut deviner l'avenir. Une des divinations, c'est mettre une assiette pleine d'eau sous le lit, et on rêvera de son futur.
Je veux le faire.
Il est onze heures, ils sont encore chez maman à bavarder. Je vais chercher l'assiette.