Mardi, 30 septembre 1873 - continued
# Mardi, 30 septembre 1873 - continued
Le prof. de math. [sic] arrive, je ne pouvais pas aller mais il fallait. Je l'ai prié de ne pas me faire travailler de la tête feignant une migraine (je n'en souffre jamais).
Heureusement Brunet ne vient pas. Je suis libre. J'ai écrit à Worth pour une robe pour maman. Je sors (robe verte mal). A quatre heures l'allemand. A cinq heures encore sortir. Ma tante est avec nous. Nous prenons avec nous Mme Anitchkoff et Olga. Bête est au Grand Hôtel pour ses robes... Nous avons parlé à M. Howard. Il a apporté mon fishing-rod. J'ai arrêté la voiture pour lui parler.
Nous avons joué aux rois avec Paul, Dina et Bête. Je suis malheureuse au jeu. Serai-je heureuse en amour ?
Mercredi 1er octobre 1873
On ne sait vraiment que mettre; je n'ai pas de jaquette et ma robe de toile c'est trop peu, vers six heures. L'affaire avec Palajka continue (Walitsky lui avait donné deux soufflets) elle s'est évadée l'autre soir et n'est revenue qu'avec un soldat pour prendre une robe. On s'est aperçu qu'il manque beaucoup chez maman, deux cents francs et trois pièces de cent francs chez ma tante, trois pièces de cent francs chez moi, une parure mosaïque de Venise et des boucles d'oreilles avec des turquoises. On n'osait l'accuser avant, lorsque tant de choses disparaissaient, mais maintenant c'est clair. Joséphine est une bonne femme, calme, exacte et obéissante.
Maman et ma tante chez les ânes, et moi, papa, Dina et Bête. La petite ânerie appartient à Gioia, car plusieurs fois je la vois sortir de là, de la porte propre, il y en a une sale à gauche. Elle était en robe de toile bleue rayée et un chapeau de paille ou mousseline avec du bleu en arrière. Elle sortit de l'ânerie, regarda notre voiture s'éloigner pendant longtemps et rentra de nouveau. Elle a un air superbe et méchant, mais une méchanceté majestueuse qui lui donne l'apparence d'une reine. Ce n'est pas méchant, c'est quelque chose que je ne puis pas expliquer.
Je voudrais tant entrer chez elle, bête que je suis je pouvais très bien le faire en son absence, en donnant un ou deux louis au concierge. Je pourrai entrer en me faisant femme de chambre, pour deux semaines. Je le ferai avec le temps.
Je me suis déjà imaginée ce temps où je serai femme de chambre, mais sans le montrer. Je me poudrerai les cheveux pour les rendre cendrés. Je ne voudrais me déguiser pour elle, mais pour ceux qui y viennent. Cette idée me poursuit, je veux tellement. Mais maman ne consentira jamais, jamais, jamais.
Mais lorsque je serai grande je le ferai absolument, absolument.
Nous avons marché de la fin de la promenade jusqu'au London House, où j'ai mangé des fruits et j'ai emporté à la maison du cochon de lait en conserve, des asperges et un concombre.
Mme Anitchkoff a envoyé des concombres salés excellents. J'ai dîné comme il y a longtemps. Un bouillon aux petits pâtés feuilletés, cochon de lait, concombres salés. Et petits poulets charmants aux concombres salés, du raisin.
Nous jouons aux rois, je n'étais pas une fois roi. Je suis rêveuse ce soir.
Je crois que Boreel est marié, sa mère est à Nice et est toujours avec une jeune femme blonde, jolie, élégante, mais un peu âgée pour Boreel.