Jeudi, 25 septembre 1873
# Jeudi, 25 septembre 1873
Mon professeur de latin est enchanté de mes progrès. J'ai fini à quatre heures et nous sortons (robe écrue Dina bien). Il fait frais et froid même vers six heures. La musique n'est pas encore installée au jardin public mais le monde arrive peu à peu. Nous restons tous en bas lorsque vient la femme de chambre de Mme Daniloff et demande M. Walitsky. Maman demande qui est malade.
- C'est M. Khalkionoff qui est malade, couché dans son lit, dit-elle.
Sur cela Dina rougit à pleins poumons et se met à arranger les cheveux pour dissimuler, mais hélas ! j'ai vu, et ma tante lui lance deux ou trois regards pleins de colère, d'indignation et d'étonnement. En effet si ce petit paysan a su lui plaire !... Mais c'est impossible, un tel vilain ! En tous cas c'est la première fois que je la vois rougir. Je ne pourrai jamais croire qu'elle... et un tel vilain ! Et qui sait ? Elle est bête et... bête.
Maman sort avec nous, Dina reste at home. C'est pour cela qu'elle est inspirée ! mais quel vilain ! Nous avons regardé des papiers pour la salle à manger et des tapis. Il faut vraiment arranger. Je ne comprends pas, comment ai-je pu permettre que nous logions dans un pareil trou ! Il faut faire mon possible pour le rendre le plus convenable. My croquet-lawn est prêt mais je n'ai pas envie de jouer. Palajka veut quitter; Marie l'a pervertie, elle pense être couturière et rêve devenir une célébrité ' Pauvre folle, que je la plains ! Elle travaillera à la journée pour deux francs et pas toute l'année encore. Pauvre bête !
A la promenade Bête me dit:
- Voilà, quelqu'un vient; Marie regardez.
Je savais qui c'était. En effet Gioia nous passe, mais j'ai vu son profil et son dos, comme elle descendait la promenade et nous montions (chapeau foncé écossais, petits bouts).
- Comme elle est jolie, dis-je.
- Oui, dit maman, jolie, charmante, on ne peut pas dire jolie, mais belle, belle.
Elle disait cela d'un ton qui disait, je crois bien belle, voilà une femme vraiment belle.
Je ne croyais pas que maman dirait cela, mon cœur a manqué de sauté. Maman continua:
- Mais pourquoi a-t-elle l'air si misérable ? Où est son chic ? Ah ! elle est bien descendue.
Il est temps, elle a trente-cinq ans et plus il me semble ! J'ai pensé cela, encore maman:
- Oui, elle est réduite à un Audiffret, il vient tous les jours chez elle.
- C'est tout de même quelque chose, elle prendra toute sa fortune et c'est quelque chose.
Maman dit que Mlle Durand ne voudra pas d'Audiffret.
- Et pourquoi pas ?
- Parce que sa mère ne voudra pas, elle a une mère et sa mère lui défendra.
- Pourquoi ?
- Parce que Audiffret va chez Gioia. Pourquoi alors se marier, pour des larmes et pour être malheureuse ? Car cet homme, il reviendra encore à son ancienne, à la maison il trouvera tout mal, tout laid, il dépouillera sa femme de ses bijoux, ses robes, jusqu'à son dernier peignoir et il donnera tout ce qu'il a à l'autre, où il passera son temps.
- Mais s'il se marie il n'aime plus l'autre.
- Oh I oh ! il recommencera, s'il l'oublie quelque temps.
Tout cela est de la morale pour moi.
Vraiment tous ces gens pensent qu'on se marie pour se tyranniser l'un l'autre. J'ai dit en deux mots mon raisonnement, journal de mars n° 3, 1873.
Il est tard, je me couche trop tard à cause de ce journal stupide.