Samedi, 30 mai 1874
# Samedi, 30 mai 1874
Fatigante journée, ayant déjeuné à la hâte chez Bénard, nous prenons le train et nous nous rendons à Sèvres.
Je suis malade et il arrive que le voyage se fait une heure après le commencement de ma maladie, le moment où je suis fatiguée et souffrante pendant deux ou trois heures.
I did not enjoy our escapade. Nous visitâmes les manufactures, c'est assez intéressant. Il fait une chaleur atroce.
A trois heures et demie nous reprenons le train de Paris, je rentre avec plaisir.
A peine dépouillée de mes vêtements, j'entends : Peut-on. Il ne faut pas, il ne faut pas ! criai-je. Mais malgré cette défense Bikowsky parut à la porte, il le fit exprès. Je lui fis une réprimande sévère et simple, il s'en souviendra, cet idiot impossible !
A six heures nous allons au Bois (chapeau jaune, robe toile neuve, cheveux relevés, et un peu flottant en boucles, qui se frisent naturellement depuis je ne les noue plus pour la nuit, sur la nuque, assez bien). Aujourd'hui tout le monde sortait lorsque nous entrions au Bois, à six heures et demie. Il y a cette soirée de Rothschild qui me tourmente depuis que je sais qu'elle existe.
Nous vîmes la princesse Souvoroff qui se tourna plusieurs fois en saluant et souriant, puis les chasseurs à pied, Fedus avec un autre piéton. J'ai ri, je n'aurais pas ri si maman n'avait pas dit: Et voilà à petits pas, à leur place. J'ai encore baissé l'ombrelle. Maman dit qu'il le remarque et qu'il triomphe. En retournant nous le revîmes à son poste, m'ayant vue il se tourna vers son compagnon et commença à lui raconter quelque chose avec empressement.
Je voudrais m'expliquer avec ce comte nu, ce Fedus charmant, cet Apollon fané.
Je m'ennuie déjà, je ne peux pas vivre en étrangère; à Nice j'y suis habituée, je me tourmente toujours. Mais à Paris cela me fait encore plus de peine.
Nous allons bientôt à Spa, je voudrais rester pour le Grand Prix, mais encore être seules comme partout, cette idée me rend chagrine.
J'aime Paris et je crois, malgré moi, que j'y dois être mieux. Il faut prier Dieu et il me fera heureuse, si je suis digne de l'être.
J'écris et je m'imagine la soirée à l'hôtel Rothschild. Quelle malheureuse nature que la mienne. J'aime, j'adore, je désire ce que je n'ai pas et ce que je n'aurai peut-être jamais...